
Biographie Oumou Sangaré
Oumou Sangare est née à Bamako au Mali en 1969. Quand elle avait deux ans, son père s’est marié une deuxième fois puis est parti en Côte d’Ivoire, laissant sa mère, enceinte avec trois enfants en bas âge. Lutter pour vivre fut le contexte de l’enfance d’Oumou. Sa mère était chanteuse et sa seule source de revenu était les « Sumus » ou « fêtes de rue » comme les appelle Oumou (ces célébrations traditionnelles de mariage et de baptême organisées par les femmes).
« À dix-huit ans, alors que je chantais dans la rue, Lamine Sidibe, directeur de l’ensemble instrumental du Mali, m’a repérée. J’ai rejoint ensuite Djoliba Percussion, le groupe de Bamba Dembélé (dans lequel on trouvait aussi le jeune Toumani Diabaté) et je suis partie avec eux sur une tournée européenne. J’étais la plus jeune de la troupe à chanter, mais je suis parvenue à me faire une place. Lorsque j’étais sur scène, le public en redemandait. C’est grâce à ça que j’ai pris confiance en moi. Je chantais des chansons du répertoire de Coumba Sidibé. » Oumou est reconnaissante à Coumba Sidibé, la célèbre chanteuse de Wasulu, de lui avoir enseigné les valeurs de pureté, de simplicité et de fraîcheur vocale.
« Quand je suis revenue à Bamako, j’ai formé mon propre groupe, avec un flûtiste, un percussionniste et un joueur de kamele ngoni (la harpe des jeunes). Je suis alors passée sur les ondes de l’ORTM (la radio-télévision nationale malienne), et le jour suivant, un admirateur m’envoyait une mobylette Yamaha toute neuve ! Cela m’a donné confiance pour continuer de chanter et poursuivre ma route »
A ce moment-là, Oumou Sangare prend contact avec le bassiste et arrangeur Ahmadou Ba Guindo, leader du National Badema, le légendaire groupe de danse jouant de la musique traditionnelle sur instruments modernes. (Après sa mort dans un accident de voiture en 1991, Oumou lui rendra hommage avec sa magnifique chanson « Saa Magni », sur l’album « Ko Sira » (« Mariage »), publié par World Circuit en 1993). Ahmadou Ba Guindo avait réuni autour d’Oumou un groupe de musiciens où figuraient Aliou Traore au violon occidental (qui avait étudié la musique à Cuba lors d’un échange culturel d’étudiants à La Havane) et Boubacar Diallo à la guitare, celui de son premier album et ancien membre du National Badema. Au cour du groupe, se trouvait le jeune joueur de kamele ngoni « Benego » Brehima Diakite, qui est resté depuis le principal collaborateur musical d’Oumou. Elle dit d’ailleurs de Benego qu’il est « le meilleur musicien du monde, et même de tous les temps». En 1989, après quelques réticences – Oumou se méfiant des pièges qui pourraient l’attendre si l’entreprise ne marchait pas -, elle commence l’enregistrement de son premier album « Moussoulou » (« Les femmes »). Il est enregistré à Abidjan, arrangé par Ahmadou Ba Guindo sort le 4 janvier 1990, et il fait un carton immédiat dans toute l’Afrique de l’Ouest. Elle a 21 ans. Ses chansons parlent ouvertement, dans cette société malienne très conservatrice, de sujets que personne jusque là n’osait aborder en public, objets d’interminables débats. Les messages sont forts : encourager les femmes à être elles-mêmes, à rechercher leur liberté personnelle et à retrouver leur dignité, les mettre en garde contre les méfaits de la polygamie et du mariage forcé, et même, aborder le sujet tabou de la sensualité, comme dans la superbe chanson « Diaraby Nene » (« Les frissons de la passion »). Un morceau d’autant plus plus remarquable en raison du format choisi : une musique traditionnelle et rurale de chasseurs Wassoulou, à peine modernisée, transmise sur un groove funk.
Le véritable impact de « Moussoulou » est encore difficile à mesurer. La cassette, avec sa musique aux sonorités superbes, directe et plus compliquée qu’il n’y paraissait, lança Oumou l’inconnue vers une énorme notoriété, et ce succès sans précédent a fait qu’il est devenu la bande-son de la vie à bamako, dans les maisons, les marchés, les magasins, les voitures et les bus.
La cassette fut portée à la connaissance de Nick Gold chez World Circuit par Ali Farka Touré, et Gold fut le témoin du phénomène lors d’un voyage à Bamako en 1991. « Vous ne pouviez pas échapper à cette musique. Et vous ne le vouliez pas. Elle était partout. Dès que vous aviez quitté un café qui la passait, vous l’entendiez depuis une voiture dans la rue, puis dans le magasin d’à côté. J’ai passé cette semaine-là à Bamako en entendant Oumou partout où je suis allé. Et je dis bien PARTOUT. »
Depuis ce jour où Ali a présenté Nick à Oumou en lui disant « Ça c’est de la musique », Oumou s’est plue à bâtir une longue et illustre carrière, voyageant à l’étranger et devenant la plus grande star africaine de sa génération. On l’appelle en Afrique l’« oiseau chantant de Wassoulou » elle l’ambassadrice du Mali pour la musique, un véritable accomplissement après seulement cinq extraordinaires albums en vingt ans de carrière.
Bien qu’elle ait un statut de superstar dans son pays, Oumou Sangare n’oublie jamais d’où elle vient, ni les vertus d’une origine modeste.
En octobre 2003 elle a été nommée Ambassadrice de la FAO (Organisation des Nations-Unies pour l’Alimentation), une charge entrant dans le cadre de la lutte contre la faim dans le monde. Elle joue également un rôle actif dans l’Association des Mères et Enfants du Mali, qui organise des distributions de millet, de lait et de riz aux mères dans le besoin. Elle croit au devoir de ceux qui sont nés chanceux de subvenir aux besoins des moins bien lotis.
Le nouvel album d’Oumou, « Seya » (joie), à paru en 2009, a mis environ deux ou trois ans pour arriver à maturation. « Je choisis mes chansons très soigneusement, et c’est d’abord sur scène que j’apprends à leur trouver la bonne interprétation. » Sa musique est vigoureuse, séduisante, géniale et vibrante, mais ce sont ses textes qui ouvrent les yeux. « Pour moi, les textes sont plus importants que la mélodie. J’écris presque toutes mes paroles. Je reprend également des classiques maliens. Je tire beaucoup d’inspiration de ce qui se passe dans la vie. Dès que je vois ou que je ressens quelque chose, je prend un crayon et je l’écris. Je dis ce que je veux, et ce que je pense, parce que je suis une femme libre. Je crois que ma musique a eu une incidence sur la vie des femmes africaines. »